2 août 2010

Un bout de route - En allant vers les vacances - Partie Cinq

Au petit matin, ben en fait, au beau milieu de l’avant-midi, décalage horaire inclus, je me suis réveillé après un excellent repos. Y’était temps! Comme dit l’adage, le sommeil, c’est comme un compte de banque : tu peux en retirer, mais tu finiras toujours par devoir en remettre. Enfin, quelque chose comme ça!

En remettant mes pantalons, papetière oblige, je trouve un vieux dollar dans la poche, oublié depuis l’hiver dernier! Bon, j’aurais préféré un 100$, mais c’est ben rare que j’en ai en main, encore moins que je l’oublie…

Je vais donc voir au bureau afin de savoir à quoi m’en tenir. Encore le même charivari qu’hier soir. Nous sommes des illustres inconnus pour eux! Et comme ma remorque est déjà dans la cour, c’est encore plus mélangeant! Jeff, le gars qui semble savoir où il s’en va (le mot important est semble!!!) me dit que j’en ai pour un maudit boutte, car il y a encore huit voyages à charger avant le mien. D’après moi, on n’a pas la même définition de l’expression « live load ». Je sais que dans le sud, les gens ne sont pas vite vite, mais là, il y a une marge. Je lui demande de me donner une heure approximative, parce que je pourrais bien décider d’aller visité la Louisiane en attendant.

Je décide de téléphoner à mon meilleur patron, afin de savoir pour qui nous ramassons ce voyage de papier-cul! Patron me donne le nom de la compagnie, ainsi que le SCAT CODE, le code à quatre lettres qui identifie les compagnies de transport dans leur système. Ah, ça leur sonne un genre de cloche. Mais on est encore loin de l’auberge! Le Jeff finit par me dire que ça devrait aller vers neuf ou dix heures dans la soirée. Ouf! Je retourne vers le camion, avec l’intention de diner bientôt. Me reste un bœuf en cube, alors voici mon diner.

À peine ai-je le temps de m’installer dans mon camion, le Jeff est à côté de ma porte. Il me dit de m’avancer avec mon camion, qu’il va m’envoyer « en dedans » pour me faire charger. Ah ben, se seraient-ils démêlés?

Je m’avance donc vers la cabane. Avec mon camion. Jeff m’explique que lorsque la porte 22 sera libéré par le « shunter », je n’aurai qu’à prendre la place, et je serai chargé peu de temps après. Il avise d’ailleurs le « shunter » de ne pas remettre une remorque lorsqu’il aura libéré ma porte. Il me donne ensuite une passe pour retourner dans la cour des remorques. Il me dit aussi qu’en fait, tout ceci aurait dû être fait hier soir, à mon arrivée. Je commence à comprendre qu’en fait, la dame d’hier soir n’a probablement pas pigé que j’étais un « live load ». Je ne lui ai pas dit, mais elle ne me l’a pas demandé non plus! Elle était trop occupé à chercher de quelle crisse de compagnie que je sortais?

J’ai retrouvé ma remorque exactement où je l’avais laissé. Évidemment, personne ne lui avait touché! Une fois accroché, je me suis rendu, selon les indications de Jeff, près de la porte 22. Bon, au pif, parce les portes 26 à 30 étaient bien identifiées vu du camion, mais par la suite, ça se gâtaient un peu. Et comme il y avait autant de remorques stationnées entre les portes que de remorques à quai, c’était ben embêtant. Je me suis stationné de façon à voir les remorques où je pensais que je devais aller.

Une trentaine de minutes plus tard, la remorque fut sortie de son trou. J’ai donc pris la place. Une autre petite demi-heure plus tard, le chargement commençait. Environ trois heures après le signal de départ, j’étais enfin chargé! L’employé qui me chargea sorti dehors pour me faire un genre de signe de départ, pour disparaitre ensuite. Et les papiers? Je n’étais pas au bout de mes peines! Comme il y avait sur toutes les portes humaines des écriteaux « Employés seulement », je me suis dit que la dame de la barrière allait bien gentiment me les imprimer. Ou le bon Jeff du début…

J’arrive donc à la balance/barrière. Je stationne mon camion sur la balance, toujours très étroite, et je me rends au guichet. Il y a dû avoir par le passer de la bagarre, car comme à la banque, on met le ti-papier dans un genre de tiroir, et la dame parle via un intercom. Avec le moteur du camion qui entre, le moteur de mon Tri-Pac, et le problème de son typique d’un intercom, assaisonné du charmant accent du sud de la dame, on n’y comprend rien. Ce n’est pas long non plus qu’il y a trois ou quatre camions derrière moi. Tiens, le criss qui bloque la balance, c’est moi! Bon, la dame ne sait pas trop où devrais être mes papiers, comme si moi, à ma première visite où bien sur personne ne m’a rien dit, je devrais le savoir. Elle téléphone à gauche et à droite, cherche ceci et cela, me demande si j’ai un numéro de commande, quelque chose… Ben, il est là, sur la feuille jaune. Elle pitonne ce numéro dans son ordinateur et, magie, des belles factures sortent de son imprimante!

Je signe ici, là et là, avec la date et toute la patente, redonne la copie à la gentille dame malgré tout, et décâlisse de sur la balance avant de causer une émeute! Comme la dame m’a donné mon poids par essieux, je constate que mon poids est beaucoup trop sur l’avant. Ça va parfaitement avec la disposition des palettes de boites de papiers d’imprimante, un peu trop compacte sur l’avant, mais rien d’impossible à balancer. En quelques minutes, me voici prêt à prendre la route. Un coup de fil au bureau, afin d’aviser que je suis toujours vivant, chargé, et prêt à prendre la route, et me voici sur la route.

Je prends donc la LA-64 pour me rendre à Zachary. Plus loin, la LA-67 m’amène à Clinton. Je fourche ensuite sur la LA-10. À Coleman Town, je bifurque sur la LA-38. Arrive le village au nom rigolo de Chipola! À Kentwood, c’est jour d’encan d’animaux, alors la place est pleine de camion pick-up de fermier avec remorques assorties… et du monde… Je retrouve là l’autoroute.

Aussitôt sur l’I-55, me voici de retour dans le Mississipi. La balance concubine (Mississipi/Louisiane) est ouverte. Le bonhomme vert (en fait, il est bleu marin, et je ne parle pas de son humeur!) est sur le pas de la porte, et veut voir mon registre. Heille, ce coup-là, il est parfait. Ça me confirme en même temps que mon ajustement d’essieux était bon. Je croyais que j’aboutirais ailleurs, mais je suis abouti juste avant la balance. Une chance que j’ai ajusté avant de partir, plutôt que de partir en me disant que j’ajusterais tout ça à la prochaine CAT Scale…

Je suis arrêté pour le souper au Pilot de Jackson, MS. Deux quêteux sont venu me voir, comme tous les autres camions d’ailleurs. Le premier voulait un « lift » vers l’ouest (ou l’est, je ne sais plus). Pas de chance, je vais au nord! Le second m’a dit que je ressemblais à un copain de Willie Nelson (j’avais mis mon chapeau). Il arrive avec la grosse poignée de main franche et tout le tralala. Lui voulait juste du bon gros « cash ». Je réponds par la négative, parce qu’on ne sait jamais à quel profiteur de camionneur (et spécialement si il a une plaque hors États-Unis) on a affaire. Dans ce cas, et surtout dans le Mississipi, je crois que le gars était sincère. Mais si vous saviez, cher ami, que j’en aurais probablement autant besoin que vous! Il m’a dit qu’un des autres camionneurs lui avait dit : dégage, sale nègre! Criss, « only in america »! Devant ma réponse négative, il a même ajouté : je respecte ça! Un peu plus, il me bénissait! Héhé!

Par la suite, je me suis rendu, à ma propre surprise, jusqu'à Osceola, AR pour y camper pour la nuit.

À suivre…

Aucun commentaire: