Un bon cinq minutes plus tard, qui en a
paru beaucoup plus, je vois reculer l'auto-patrouille. C'est là que
ça passe où ça casse, que je me dit. Et sur une semaine de trois
jours, deux et demi même, si j'ai un billet, autant dire que
j'aurais été mieux au chaud à la maison! Je baisse ma fenêtre du
passager. Le policier :
- Qu'est-ce qu'on peut faire pour
vous?
Toujours mieux d'y aller avec la
vérité...
- Est-ce que c'est permis que je
mange mon souper ici? Dis-je en observant la dizaine d'affiches
« Stationnement interdit ».
- Non! Est-ce que tu peux faire le
tour? Dit le policier en me pointant l'autre camion.- Est-ce que ça passe là où vous étiez stationné?
- Oui oui, fais ce que tu veux, mais contourne et va t'en!
Dans ce temps-là, tu ne prends même
pas le temps de dire merci, et tu décâlisses! En espérant qu'il
n'appelle pas son copain un peu plus loin (mais ça, j'imagine qu'on
ne voit ça que dans les films)!
Je contourne et je reprends
l'autoroute. En peu de temps, la circulation s'accélère, et un peu
plus loin, un halte routière pour camion seulement se présente à
moi. Tiens, c'est ici qu'on soupe!
La halte elle-même est barricadée, et
sert de local pour la voirie. Et comme ils sont bien gentils, ils ont
laissé la section de stationnement pour les camions ouverte. Ça et
une toilette bleue, on est bien reçu dans le New Jersey! Tout en
mangeant, j'essaie d'évaluer le temps qu'il me faudra pour rejoindre
l'état de New York, et donc le Thruway. Ça ne me semble pas loin,
mais mes souvenirs de ces environs, eux, sont très loins! En tout
cas, une fois bien rassasié, j'ai ben de l'ambition...
Environ une heure plus loin par contre,
je n'en ai plus. Je songe à sortir au relais de Mahwah, NJ, au début
de la NJ-17, pour voir en même temps si ça existe encore... mais un
sympathique moron ne veut pas vraiment coopérer. Je dois donc
demeurer dans la voie de gauche, manquant ma sortie, et par le fait
même me retrouvant sur la I-87. Au moins, c'est ma route... mais là,
je commence à trouver que je pousse un peu ma chance. J'espère
qu'il restera du stationnement à la halte de Sloathsburg, NY, parce
que la suivante est à trente minutes plus loin, et ça, je n'en
aurai pas la force!
J'arrive rapidement à la halte, et j'y
entre tout doucement, en surveillant les places libres, où dont le
chauffeur semble à « ça » de repartir. Heureusement, il
y a une belle place qui m'attend! Je vais à l'intérieur de peine et
misère, je cherche la salle de bain (il y a si longtemps que je n'y
ai mis le pied), puis me souviens que l'aisance, c'est en fou quand
même...
La nuit sera reposante, mais lorsque l
haut, sur la mezzanine. Ça me prend tout ce qu'il me reste d'énergie
pour faire mon travail puis retourner au camion. Il n'est que
dix-huit heures trente! Wow... Journée bien remplie, mais journée
dee cadran sonne, bien que je sois loin, je décide d'avancer l'heure
du cadran. Mais bon, dans trop le savoir, parce que ce n'est pas
évident, et qu'en plus je dors debout, j'avance en fait l'heure et
non l'alarme! Je me rendors pour me réveiller que deux heures plus
tard, tout surpris...
Je m'habille et je vais à l'intérieur
pour un petit café et bagel du Dunkin Donuts (ça fait changement du
Tim...). Je constate à ce moment qu'il est plus tôt que dans le
camion. C'est là que je me rends compte de mon erreur de
pitonnage... mais bon, si j'ai dormi douze heures, j'imagine que
c'est que j'en avais besoin!
Je pars donc pour me refaire le New
York Thruway dans l'autre sens, un autre vingt-six piasses. En
passant dans la halte au nord d'Albany, qui sert de balance et qui
était ouverte, je constate qu'un TJB y est en bonne compagnie :
une auto-patrouille de chaque côté. Tiens, le camion rouge; c'est
Béatrice. Je lance un appel radio, qui reste sans réponse. Bon, un
moment donné, elle va repartir et me rattrapper! Ensuite, un arrêt
à Wilton, NY afin de faxer mes papiers au bureau pour la douane.
J'envoie mes numéros au bureau afin qu'ils puissent vérifier tout
ça pour moi pendant que je roule.
Après un arrêt aux toilettes à la
halte en bois rond dans les montagnes, et une visite à la balance de
presque Plattsburg, NY, je reçois ma confirmation pour la douanes
juste avant Champlain, NY, la ville de la frontière mais aussi le
dernier relais, Champlain Peterbilt, où je voulais sortir pour un
p'tit café. Mais bon, je décide de me rendre aux douanes, j'aurai
tout le loisir d'arrêter après.
Le douanier me pose les questions
habituelles... et m'envoie au quai pour vérification. Comme les
quatre quai sont occupé, je me stationne et je vais à l'intérieur.
Les gars qui sont là parlent de un heure et demi à deux heures pour
y passer. Ouf... Un douanière finit par prendre mes papiers et me
dire de reculer à un quai avant de me faire prendre ma place. Je
m'exécute, et comme j'ai le temps, je vais dans la section où se
trouve les toilettes et, accessoirement, les machines à cochonnerie.
À mon retour, tout le monde a quitté.
Alors j'attends, et j'attends. Un moment donné, un homme arrive et
dit :
- Est-ce que c'est vous pour tel
client?
- Oui...- Ah, on vous cherchait tantôt!
- J'étais aux toilettes...
Ils ont donc pu procéder. À partir de
ce moment, ça a été raisonnablement rapidement. Je me suis rendu
compte que c'était l'Environnement qui nous vérifiait. D'ailleurs,
tout ce qui était à quai avant et après moi était de la matière
dangereuse!
Une heure et demi après mon arrivée,
je recevais finalement mon papier bien étampé pour sortir de là.
Tout était évidemment parfait! Je me suis ensuite rendu chez le
courtier en douane afin de recevoir mes placards. Je les ai ensuite
installé sur chaque face de ma remorque. J'ai ensuite téléphoner à
Jean-Luc, afin de savoir la suite de mon voyage : « emmène
ça au garage ». À partir de ce moment, je devais me mettre à
penser que je transporte des matières dangereuses, ce qui n'est pas
évident quand ça fait une journée où tu n'as pas eu à le
faire...
Ne me restait qu'à franchir la
dernière heure de route qui me séparait du bureau. Ce qui fut fait
rapidement, parce que je commençais à avoir hâte de poser mon sac
de cuir. Bon, je savais que je ne le poserais pas longtemps au
garage, parce que la tradition veut que je poursuive la route jusque
chez moi avec le camion. Oui, je sais que je suis gâté! En même
temps, c'est parce qu'on a le gros client des voyages pour Lebanon
que ça me permet ça. Ça fait autant l'affaire du patron que de
moi.
En arrivant au garage, je me suis dit
que Béatrice pourrait bien être rentrée elle aussi, ou sinon, avec
tout le temps que j'ai passé aux douanes, elle allait arriver avant
que je ne reparte. Un coup d’œil dans la cours et je constate que
son camion n'y est pas. Facile, car elle a notre seul camion rouge
vif!
Je fais mon plein de bon Diesel, puis
je stationne mon camion. Martin qui passait par là vient constater
que mon alarme de basse tension sonne encore aussitôt que la porte
s'ouvre. Je rentre ensuite à l'intérieur afin de voir de quoi sera
fait ma rentrée avant que Jean-Luc ne quitte (bon, sur le coup, je
n'ai pas pensé que le vendredi, c'est jour de rumba, alors ils
collent tous au bureau plus longtemps).
En allant jeter un œil dans le garage,
je constate que le camion rouge est là, en pleine opération
« entretien »! Retournant vers le bureau, je me dit
qu'elle est sûrement encore sur place... Et au même moment, des
voix émanent de la cuisine. Je me tourne vers la fenêtre de la
porte... pour voir un voyage de foin frisé! ;)
Enfin, je rencontrais la seule et la
vraie Béatrice, après tant de discussion par Facebook interposé.
Ça fait toujours drôle de rencontrer pour la première fois
quelqu'un qu'on connaît virtuellement depuis un bon bout de temps.
Une étrange impression de se connaître sans se connaître.
Alors après avoir fait un peu de
jasette avec tous ceux qui sont passé par la cuisine, notre quartier
général pour la soirée, soit les répartiteurs, les mécaniciens,
les chauffeurs de ville qui revenaient de leur journée, et même
quelques chauffeurs US qui revenaient tout comme moi de leur semaine,
ou la commençait, c'est selon, Béa m'a partagé une partie de son
souper, qu'elle avait fait réchauffer pendant tout ce temps. Alors
que je m'abstenais de participer à la « p'tite bière du
vendredi », vu que techniquement je retournais chez nous, les
autres se faisaient plaisir allègrement!
Nous avons évidemment fait
connaissance « en personne » et ce fut très agréable.
Un moment donné dans la soirée, je suis retourné dans mon camion,
et j'ai constaté que Caro me cherchait. Je lui ai téléphoné chez
son amie Nadine. Vu l'heure avancée, j'ai décidé de coucher au
garage et de partir plus tôt le lendemain matin. Je me devais de
partir tôt car, le soir était le souper pour le quatre-vingtième
anniversaire de tante Anna. C'était d'ailleurs la raison pour
laquelle ma semaine se compose d'un seul voyage dans la grosse pomme,
soit deux jours et demi (parce que ce fut long).
Je suis donc retourné à l'intérieur
pour annoncer la bonne nouvelle. Béa suggéra donc que je lui fasse
visiter le dépanneur, vu qu'on manquait déjà de boisson! Ça
promet pour le souper de noël! Dormant sur place, je pouvais
maintenant participer activement... et je n'allais pas me faire
prier!
La soirée s'est donc poursuivi
jusqu'aux petites heures... c'est long, faire connaissance! Nous
sommes passés bien prêt de manquer de bière... il en est rester
une seule (que Béatrice a dompté parait-il dès son retour de la
semaine suivante)! Ce fut une soirée très agréable... J'ai déjà
hâte de rouler avec elle.
Le lendemain... ou devrais-je dire
quelques heures après m'être étendu, je me suis réveillé afin de
partir faire mon « arrivée ». Je devais prendre une
remorque pleine chez TJB, l'amener à notre cour de Lachine,
l'échanger avec une vide que j’amène à Joliette. Le tout en
espérant, de tôt matin, que le pont Mercier soit ouvert du bon bord
(bon, ok, il est maintenant ouvert des deux directions au moins sur
une voie) et surtout que le message de sortie ait bien été envoyé.
Impossible de se faire voler une remorque à notre cour de Lachine,
car même nous tout a fait légalement, on a parfois de la misère à
sortir!
Je suis arrivé à la maison juste à
temps pour embarquer dans l'auto... Il faut aimer la route!